Rapailler nos territoires, préface
Stéphane Gendron écrit: « Au cœur du débat sur l’avenir de notre humanité, il doit nécessairement y avoir un élément de décroissance dont personne ne veut entendre parler. » Et pour cause! Si l’on croit encore aujourd’hui qu’une croissance économique soutenue est l’apanage d’une société qui va bien, c’est qu’on oublie non seulement que les ressources de notre planète sont épuisables, mais aussi que l’opulence des uns découle généralement de l’appauvrissement des autres. À la lecture de l’ouvrage de Stéphane, je pense à l’abandon de nos terres au profit des villes, mais également à la dévalorisation de la polyvalence au profit de la spécialisation. D’une population plutôt rurale qui détenait une multitude de savoir-faire pratiques et savait s’en tirer avec les moyens du bord, nous sommes passés à une population plutôt citadine, beaucoup plus scolarisée, avide d’emplois spécialisés lui permettant de mettre en valeur un nombre de plus en plus restreint de compétences de plus en plus pointues. Ainsi est né le travail en silo : il ne s’agit plus d’être capable de tout faire avec un certain degré d’efficience, mais de faire une seule chose très efficacement. Obnubilée par de nouvelles ambitions productivistes, la population urbaine s'est laissée aisément convaincre qu’il était plus moderne d’acheter que de faire, et plus pratique de remplacer que de réparer. On s’est rapidement épris de cette société de consommation dont plusieurs commencent aujourd’hui à réaliser les limites et à admettre les travers.